Pro Invest Finance

Conjoncture économique du deuxième trimestre 2018

Publié le 14/10/2018

 Conjoncture économique du deuxième trimestre 2018.

__________________________________________

Emmanuel VARLET

__________________________________________

                                                    

Chers clients,

Au cours de l'année 2017, l'économie mondiale a connu une période de nette reprise, soutenue par les différentes Banques Centrales. Ces dernières avaient repoussé plusieurs fois le relèvement de leurs taux directeurs et maintenu un niveau élevé de rachats d'actifs afin de consolider la reprise de la croissance. Ce contexte favorable aux économies des pays développés a permis d'afficher une croissance mondiale de 3,6% sur l'année (contre 2% en France).

En 2018, sous l'impulsion des Etats-Unis, la longue période de baisse des taux que nous avons connue depuis plusieurs décennies est désormais derrière nous et même si les Banques Centrales américaine et européenne planifient des relèvements progressifs de leurs taux directeurs sur les prochaines années, nous entrons désormais dans une nouvelle ère jusqu'ici inconnue des économistes, et ce dans le cadre d'une accélération de la mondialisation. En tenant compte de tous ces paramètres, nous allons tenter de décrypter les grandes tendances qui se dessinent progressivement au travers d'une synthèse des analyses publiées les dernières semaines par les principales sociétés de gestion.

 

En cette période estivale, nous profitons de l'occasion pour vous souhaiter d'excellentes vacances !

 

  • Contexte économique : fin de la baisse des taux et protectionnisme

Une dizaine d'années d’interventions hors normes sur les marchés financiers par les Banques centrales avaient jusqu'ici légitimé un climat financier quelque peu irrationnel. Peu importait pour les investisseurs le cycle de croissance économique, le rythme d’inflation, les valorisations ou les risques puisque les achats de dettes souveraines par les Banques centrales étaient le seul critère décisif pour estimer le prix des actifs financiers. En comprimant de façon délibérée et programmée les taux d’intérêt, l’action des Banques centrales masquait ainsi la volatilité et soutenait la hausse des marchés, allant jusqu'à inventer les taux négatifs. Cette stratégie s'était d'ailleurs finalement avérée payante puisqu'elle avait permis de faire redémarrer la croissance mondiale sur l'année 2017.

Cependant, après un début d'année 2018 relativement euphorique, les marchés ont connu notamment fin mai des turbulences dues à plusieurs facteurs : ralentissement de la croissance, crises politiques en Italie et en Espagne, tensions commerciales accrues entre les Etats-Unis et le reste du monde, tensions géopolitiques avec le Moyen-Orient.

L'Italie en particulier a été l'un des éléments déclencheurs de cette récente correction dont l'ampleur reste toutefois modérée. La difficulté du mouvement 5 étoiles/Ligue à créer un gouvernement et les risques de crise pesant sur l’Europe ont créé un sentiment de défiance. Les taux d’intérêt italiens ont connu une hausse brutale, les valeurs italiennes ont baissé de près de 10% et les valeurs européennes de 4%. Fin mai, le marché a attribué un risque souverain plus élevé à l’Italie mais aussi au Brésil et à la Turquie.

Pour faire face à ces incertitudes de court terme sur la croissance économique toujours fragile, la BCE a décidé mi-juin, de prolonger jusqu’à fin 2018 ses rachats d’actifs, en passant toutefois de 30 à 15 milliards € par mois. Elle a d'autre part annoncé qu’elle attendrait la fin de l’été 2019 pour procéder à sa première hausse de taux directeurs si aucune surprise économique majeure ne vient perturber le calendrier. L’intention de la BCE est ainsi de fixer elle-même le calendrier et de maintenir pour quelques mois encore les taux de marché à des niveaux très bas. Ce message important pour les mois à venir est très rassurant pour les marchés européens par sa grande clarté : il est désormais très peu probable que les taux européens montent avant l’automne 2019.

La Banque Centrale reste confiante sur la solidité de la croissance même si celle-ci ne retrouvera pas la progression très rapide de 2017. Ses prévisions pour 2018 ont été abaissées de +2,4% à +2,1% à cause d’incertitudes temporaires qui pèsent sur le court terme. La BCE confirme par ailleurs ses prévisions de moyen terme et indique que la faiblesse des publications récentes reste cohérente avec une croissance économique solide et largement répartie. En conséquence les marchés gagnent en visibilité sur l'année à venir.

Pour ce qui est de l’inflation, la BCE a relevé ses prévisions 2018 et 2019 de 1,4% à 1,7% (notamment en raison de la hausse des prix du pétrole). Mario Draghi note toutefois que les menaces d’un protectionnisme accru sont devenues plus importantes.

Il n'a d'ailleurs pas fallu attendre longtemps puisque Donald Trump a dans la foulée relevé les droits de douanes sur les importations (taxes de 25% sur les importations d’acier et de 10% sur celles d’aluminium, 50 milliards $ supplémentaires d’importations chinoises taxées, menace sur l’automobile, et en particulier les fabricants allemands). Aux nouvelles taxes décidées par le président américain, le Canada, la Chine et l'Europe ont dû répondre par des représailles :  Canada taxe de 25% sur l’acier et les métaux, taxe de 10% sur divers produits ; Mexique 3 milliards € de taxes sur les importations en provenance des États-Unis de porc, d’acier et de fromage plus en discussion 4 milliards additionnels sur les céréales ; Europe 2,8 milliards € de taxes sur l’acier, l’agro-alimentaire dont le bourbon et les motos ; Chine taxes de 25% sur plusieurs produits, 50 milliards supplémentaires taxés dont le soja.

La guerre commerciale est bien déclarée entre les Etats-Unis et le reste du monde (l'objectif principal du président américain étant d'affaiblir en priorité la Chine, son principal concurrent). Cette partie de poker menteur devrait cependant connaître des conséquences relativement limitées car la Chine a déjà fait pression en revendant massivement des emprunts d'Etat américains en représailles. La marge de manœuvre du président Trump est de fait limitée mais il souhaite envoyer un signal fort à son électorat, en amont des élections de mi-mandat, une stratégie qui semble cependant payante à en juger par les résultats des récents sondages.

Une chose est donc sûre, nous entrons depuis quelques semaines dans une nouvelle ère, où les taux devraient remonter sur plusieurs années et où les équilibres mondiaux sont en train de changer.

 

  • Point sur l'évolution des marchés :

 

Le risque d’escalade dans le conflit commercial entre les Etats-Unis et leurs principaux partenaires s’est traduit par une baisse généralisée des marchés actions en juin, et par une hausse de la volatilité. La plus forte baisse a été supportée par les valeurs émergentes, pénalisées par la hausse du dollar.

Les mesures protectionnistes de Donald Trump et la riposte de la Chine, de l’Europe et du Canada ont déjà des répercussions palpables : ralentissement de la croissance mondiale, flux de capitaux sortant des marchés actions vers les taux sans risque ...

Les principaux indicateurs restent malgré tout positifs. En Europe, comme nous l'avons vu, le conseil des gouverneurs de la BCE a officiellement indiqué que les taux d’intérêt resteraient inchangés, au moins jusqu’à l’été 2019, afin de stimuler la croissance. Ce contexte constitue toujours un filet de sécurité apaisant pour les investisseurs et le mois de juillet semble confirmer une tendance à nouveau haussière après un mois de juin ayant connu une correction de plus de 6%.

evolution cac40

Evolution du CAC 40 sur 1 an

La croissance économique de l’Eurozone a finalement rebondit en juin après s'être repliée en avril et mai, grâce à la bonne tenue de certains indicateurs chinois et américains. Cependant, cet équilibre demeure fragile car l’escalade verbale du président Trump menace désormais d’inclure la totalité du commerce sino-américain ... Dans le même temps, les sociétés américaines commencent à souffrir et menacent de délocaliser leur production (Harley Davidson par exemple) s’attirant les foudres présidentielles. Le marché a paru s’en soucier un moment mais semble désormais totalement insensible. L’Europe qui avait fait la première les frais des attaques de Trump semble en effet s’en sortir sans trop de mal. Comme à chaque fois, Trump tonne et exige, puis discute et transige très en deçà de ses exigences premières. Il faut lui reconnaitre néanmoins une chose qui rend sa posture moins absurde qu’il n’y parait : les US sont le plus gros marché d’importations du monde et les sociétés US vendent essentiellement... au marché US !

En résumé, nous devons prendre en compte des changements marquants de notre environnement d’investisseurs :

  • Du côté négatif :

-     La croissance en Eurozone est plutôt en phase de ralentissement,

-     Le président américain a lancé une offensive sur les échanges commerciaux en s’affranchissant des règles du commerce international,

-     Les résultats des élections et le nouveau gouvernement italien ainsi que les problématiques migratoires de l'Europe suscitent interrogations et inquiétudes,

-     La hausse du prix du pétrole accroît les coûts de production et freine la consommation des ménages.

  • Du côté positif :

-      La croissance en Chine et aux États-Unis est meilleure qu’attendu,

-      Les taux € restent à des niveaux très bas et ne suivent pas la hausse des taux US,

-      Les résultats des entreprises sont meilleurs que prévu, ils sont révisés à la hausse aussi bien aux États-Unis qu’en Eurozone alors que l’effet négatif du $ est désormais derrière nous,

-      Les valorisations, des actions allemandes et françaises restent modestes.

En conclusion, il faut retenir que les marchés réagissent avec excès depuis deux trimestres. La vérité est certainement plus nuancée car malgré un léger fléchissement depuis deux mois, les indicateurs macro-économiques restent plutôt bien orientés en Europe comme aux Etats-Unis. Les prévisions de croissance pour 2018 sont toujours de 4% au niveau mondial et 1,7% en France.

Le premier semestre a été plutôt médiocre sans être négatif pour autant. Le second pourrait être un peu plus sympathique, même si nous n'avons pas encore une grande visibilité.

  • Point sur les principales économies :
  • En zone euro :  ralentissement sur le trimestre

La croissance économique de l’Eurozone s'est repliée à un plus bas de 18 mois en mai. Si l’expansion reste relativement soutenue, le ralentissement observé depuis le début de l’année indique une dégradation des perspectives économiques de la région par rapport à celles du 1er trimestre. La région devrait ainsi enregistrer sur l’ensemble du deuxième trimestre ses plus faibles performances économiques depuis 2016. Au mois de juillet, les chiffres semblent connaître une légère embellie mais il est encore un peu tôt pour le confirmer.

Le seul pays parmi les 4 premières économies de l’Eurozone à enregistrer une accélération de la croissance au cours du trimestre est l’Espagne, qui prend la tête du classement des pays. L’expansion ralentit en France (plus bas de 16 mois) et en Allemagne (plus bas de 20 mois). L’Italie quant à elle se maintient en queue de peloton pour le 5ème mois consécutif.

(Le problème reste bien entendu récurrent, la zone euro est encore loin de s’être accordée sur la mise en place d’un budget européen qui puisse pallier les contraintes des budgets nationaux au prochain ralentissement).

Ces épisodes successifs rappellent la fragilité politique d’une zone euro qu’une partie importante des peuples européens rejette pour différents motifs, notamment les problématiques migratoires et budgétaires.

En Italie, l'arrivée d’un gouvernement populiste n’est certainement pas le préalable à une sortie de la zone euro. Le président Mattarella, pro-européen, a le pouvoir d’empêcher un « italexit » qu’une majorité d’italiens refuse par ailleurs. Ce qui est plus préoccupant à court terme est la probable dérive budgétaire liée aux nombreuses promesses de la nouvelle coalition. Toutefois, à l’image d’un Alexis Tsipras en Grèce, les marges de manœuvre du gouvernement sont assez faibles. Il faudra malgré tout surveiller de près les évolutions politiques italiennes dans les prochains mois.

En Espagne, la destitution de Mr Rajoy, dont le parti est condamné pour corruption, est une surprise. Un nouveau gouvernement, présidé par le socialiste Pedro Sanchez et soutenu par une majorité hétéroclite et fragile, prend le pouvoir.

En marge de la zone Euro, Theresa May est désormais sous pression avec la démission de son ministre du Brexit, David Davis, après l’annonce d'un accord du gouvernement britannique pour maintenir, post-Brexit, une relation commerciale étroite avec l'Union européenne (Mr Davis étant partisan d'une sortie dure de l'Union européenne).

  • États-UnisCroissance forte, remontée des taux et guerre commerciale

 Aux États-Unis, la Fed a relevé lors de sa réunion des 12-13 juin ses taux directeurs à 1,75/2% et annoncé l’accélération de la réduction de la taille de son bilan en passant d’un rythme de 30 milliards$ à 40 milliards$ par mois de ventes d’actifs. Les participants y ont également relevé leurs prévisions d’inflation et diminué celles du nombre de chômeurs. La croissance est donc plus solide, elle s’appuie tant sur l’accélération de la consommation que sur celle de l’investissement alors que l’inflation est désormais autour de l’objectif (2%) de la banque centrale.

La prévision de croissance US pour 2018 passe de +2,7 à +2,8%, ce qui conforte les anticipations de hausses des taux directeurs. Plusieurs nouvelles hausses de taux sont donc attendues pour les deux ans avec pour objectifs 2,9% en 2019 et 3,25/3,5% en 2020.

Le scénario comporte toutefois quelques ombres au tableau : le niveau d’endettement des entreprises non financières et les craintes protectionnistes. Les chefs d’entreprise américains commencent à s’inquiéter des impacts potentiels des mesures protectionnistes de D. Trump.

 

  • Dans les Pays émergents : L'offensive commerciale américaine pèse sur les économies.

L’assaut mené par les États-Unis contre la forteresse commerciale chinoise, conjugué au tarissement de la source mondiale de dollars a affaibli les pays émergents dans leur ensemble. La Bourse chinoise a perdu 15% de sa valeur depuis le début de l’année et, par contagion, les devises du monde émergent se sont affaissées. Même si certains s'inquiètent de la santé de l'économie chinoise, celle-ci dispose de moyens considérables pour faire face aux Etats-Unis. Les économies les plus dépendantes d’un financement externe en dollars ont naturellement le plus souffert, et en particulier l’Argentine, dont les progrès réguliers mais encore fragiles ont été balayés par une violente bourrasque de défiance des investisseurs.

L'Inde a pour sa part dépassé la France dans le classement des économies mondiales et passe à la sixième place. La remontée de New Delhi dans le classement des grandes puissances économiques mondiales n'est pas réellement une surprise, le phénomène est mécanique et atteste du rattrapage des pays émergents (l'Inde est 20 fois plus peuplée qu'en France !). Les grands équilibres sont donc en train de changer au niveau mondial.

  • Nos conseils à court terme :

Si nous voulons profiter de la situation actuelle, toute baisse significative des marchés actions marquera un point d’entrée intéressant dans un objectif moyen/long terme. Parallèlement, il faudra prendre conscience que les actifs sans risques ne vont quasiment plus payer désormais et qu'un panachage sur différentes classes d'actifs sera maintenant incontournable.

  • Actions : une volatilité accrue sur 2018.

En 2018. la volatilité devrait être présente tout au long de l'année. Jusqu'ici, les actions européennes disposaient d'une marge de progression plus importante que les actions américaines car plus sous-valorisées. Aujourd'hui, avec le contexte de guerre commerciale que nous traversons, il est probable qu'à court terme, les actions US resteront plus performantes qu'en zone Euro. Toutefois, à moyen terme, l'Europe et les émergents devraient conserver leur marge de progression, tandis que les Etats-Unis risquent de connaître une correction significative après une période de nette surévaluation. La thématique des actions technologiques devrait encore rester payante cette année.

Les investissements en actions demeureront par conséquent toujours une classe d'actifs incontournable dans la construction d'un portefeuille équilibré à dynamique mais elle s'inscrira plus que jamais dans une logique de long terme (il faudra donc se montrer patients !).

  • Obligations : très peu d'opportunités

Pour mémoire, en matière obligataire, une hausse des taux a pour effet de diminuer le rendement des obligations existantes puisqu'il devient possible de trouver des obligations plus intéressantes sur le marché. Avec la remontée certaine des taux orchestrée par les Banques Centrales, il sera désormais très difficile de trouver des actifs obligataires rémunérateurs et sans risques. Hormis quelques exceptions (obligations indexées sur l'inflation), l'une des rares façons d'obtenir un rendement intéressant consistera à sélectionner des fonds d'obligations datés et fermés, n'investissant pas dans de nouvelles lignes obligataires en cours de vie et jusqu'à leur terme (puisque tout nouvel investissement aurait tendance à faire baisser le rendement initial).

  • Assurance-Vie : avantages maintenus

L'application de la flat tax a eu pour effet immédiat de limiter les disparités de fiscalités sur la plupart desrevenus du capital. Néanmoins, le cadre fiscal de l'assurance-vie demeure toujours très favorable (en ce qui concerne notamment la transmission du capital ou la souplesse de gestion).

A noter également (même si ce n'est pas nouveau) que la remontée des taux incite de plus en plus fortement les assureurs à envisager à court ou moyen terme la disparition programmée du fonds Euros au profit d'unités de comptes moins sécurisées.

  • Immobilier : La valeur sûre

Alors que les actifs financiers classiques sont régulièrement attaqués et n'arrivent plus à assurer une progression linéaire à court terme, l'immobilier offre toujours une certaine régularité pour générer des revenus complémentaires. Même si la politique actuelle demeure paradoxale par le fait d'une incitation à construire plus de logements tout en maintenant une taxation toujours lourde de la détention et des revenus immobiliers (avec l'IFI et la fiscalité sur les revenus fonciers), bon nombre d'investisseurs se replient actuellement sur les SCPI ou l'immobilier en direct. La faiblesse des taux de crédits permet en effet encore de réaliser des montages intéressants (taux de crédits constatés au mois de juin : 1,44% en moyenne).

A titre d'exemple, il est utile de s'intéresser actuellement aux OPCI (Organismes de Placements Collectifs Immobiliers) basés sur la fiscalité en meublé (LMNP). Ces investissements peuvent s'envisager à partir de quelques milliers d'Euros et sont en l'état actuel exemptés de fiscalité. Leur rentabilité dépasse les 4% nets.

contact@proinvest.fr

www.proinvest.fr