Pro Invest Finance

Analyse conjoncturelle T1-2015

Publié le 26/01/2017

Bilan du premier trimestre et perspectives 2015

Emmanuel VARLET

Chers clients, après un début d'année 2015 sans tendance en janvier, les marchés actions ont connu une forte hausse sur le premier trimestre et jusqu'à fin avril. La majorité des analystes ont anticipé une poursuite plus modérée de la hausse pour le reste de l'année. Pourtant, une remontée des taux attendue depuis plusieurs mois vient brutalement de démarrer début mai. Comment doit-on réagir face à cette situation lors des prochains trimestres ? Nous allons tenter d'éclaircir les tendances à court terme ...

Contexte économique : Les marchés sont-ils devenus trop chers ?

Les marchés sont toujours aussi surprenants, alors que l'on anticipait un maintien des taux obligataires au plus bas sur les 6 prochains mois, les taux des emprunts d'état allemands ont été presque multipliés par 10 en quelques jours début mai. Il en a été à peu près de même pour les autres pays de la zone Euro. Bien sûr, il était prévisible que ce mouvement de baisse des taux finirait par s'arrêter un jour, mais le timing a surpris tout le monde. En d'autres temps, un mouvement de cette ampleur aurait provoqué un krach obligataire. En fait, ce mouvement a été déclenché pour une grande part par des prises de bénéfices des investisseurs américains, notamment suite à la remontée de l'euro.

Taux des emprunts d'Etat 10 ans en France et en Allemagne

Depuis quelques mois, le marché était évidemment trop complaisant, puisqu'il poussait les taux sur des niveaux d'autant plus insoutenables qu'ils étaient inferieurs au taux de dépôt. L'amélioration des conditions macro économiques en zone Euro  et l'impérieuse nécessité pour la FED de retrouver des marges de manœuvre en cas de décélération future de la croissance américaine nous rappellent que, même si les taux peuvent rester bas encore quelques mois, l'orientation future est nécessairement à la hausse.

Néanmoins, le mouvement actuel devrait être limité par des forces de rappel techniques fortes, liées aux achats de la BCE. Rappelons nous que les excédents de liquidité vont continuer à augmenter - ils sont aujourd'hui à 297 milliards.

Du côté des actions, après la forte hausse du début de l'année, les prix des actions sont-ils excessifs et peut-on considérer que nous sommes à la veille d’une nouvelle bulle financière ?

Sans doute pas. Le prix d’une entreprise correspond théoriquement à un multiple de ses bénéfices futurs. Si l’on considère le ratio prix des actions/dividendes distribués, il a été en moyenne de 47 sur les 23 dernières années, soit un dividende annuel de 2%. Ce même ratio s’élève actuellement à 30, ce qui laisse une marge de hausse respectable à moyen terme.

En ce moment, de puissants moteurs structurels favorisent l’activité. Celle-ci bénéficie dans le même temps d’un système financier considérablement assaini depuis 2011. Trois facteurs conduisent toujours les investisseurs à privilégier les marchés actions, et notamment les actions européennes : le regain de pouvoir d’achat dû à la baisse des cours du pétrole, la faiblesse de l’Euro face au Dollar qui favorise les entreprises exportatrices, et la politique de "quantitative easing" agressive de la Banque Centrale Européenne. On observe une reprise de la consommation. Pour la première fois depuis 2012, les PIB européens sont révisés à la hausse.

Toutefois, la hausse des actions au 1er trimestre a été forte. On ne peut pas exclure une rechute temporaire, malgré ces facteurs de soutien, c'est ce que nous constatons les dernières semaines (en particulier, les prix des actions demeurent élevés aux Etats-Unis, ces derniers connaissent une sixième année consécutive de hausse. Prudence...).

Les zones d’ombre demeurent en Ukraine et à plus court terme, en Grèce. Le sort de la dette de ce pays suscite des inquiétudes auprès des principaux créanciers et continue d’être une source de volatilité sur les marchés financiers.

Point sur les principales économies :

  • En zone euro :  progression et scepticisme

    La Banque centrale européenne a procédé à ses premiers achats de titres souverains, entraînant en premier lieu une forte pression à la baisse des taux : le taux à 10 ans allemand a atteint un plus bas historique de 0,17%, dans le courant du mois d'avril, resserrant son écart avec le taux espagnol, avant de connaître cette importante remontée début mai.

    Le maintien d'un euro toujours faible par rapport au dollar et les cours du pétrole continuent de doper l’activité économique, ce qui permet à la zone Euro de sortir de la déflation au mois d'avril. Les incertitudes sur les pays émergents favorisent les transferts d’investissement vers l’Europe.

    La reprise semble donc bien engagée mais pour perdurer, elle doit être cyclique et structurelle. Par ailleurs, une remontée du risque politique n’est pas à exclure avec la défaillance de la Grèce.

    Quoiqu'il en soit, les comptes annuels des sociétés du CAC 40 dévoilent une bonne santé des grands groupes français et une prévision du taux de bénéfice par action de +5,8% en 2015.

    En Allemagne la dynamique économique enregistrée fin 2014 se prolonge. L’indice du climat des affaires  s'est fortement redressé.

    En Espagne, le dynamisme de la consommation des ménages et la bonne tenue de l'investissement industriel constituent un terrain fertile pour consolider la reprise.

    l’Irlande et l’Espagne demeurent ainsi les pays les plus performants en avril, l’accélération de la croissance aux Pays-Bas et en Italie permettant cependant à ces deux pays de se rapprocher de la tête du classement. Pour changer, la contraction se poursuit en France et en Grèce en avril, l’écart se creusant entre les indices PMI de ces deux pays et ceux du reste de l'Europe ...
     
  • Aux États-Unis : des indicateurs contradictoires

    Les marchés américains restent suspendus à la hausse probable des taux d’intérêts.

    La FED a révisé à la baisse ses prévisions de croissance et d’inflation au mois de mars, intégrant notamment la hausse du dollar et la baisse du prix du pétrole. Elle opte pour une position très prudente dans la normalisation de sa politique monétaire. Il est assez probable que sa première tentative de remontée des taux va être une fois de plus temporisée pour ne pas risquer de bloquer la reprise mondiale.  
     
  • Dans les Pays émergents : les producteurs de pétrole impactés

    La fin possible de la politique monétaire accommodante des Etats-Unis affecte de nombreuses économies émergentes, trop dépendantes des flux de capitaux étrangers. Les producteurs d’énergie et de produits de base sont également pénalisés par la décélération de l’économie chinoise.

    A l’inverse, la Russie pourrait sortir de la crise plus rapidement que prévu. Début avril, le rouble est devenu la monnaie la plus rentable du monde : en deux mois son cours a augmenté de 22,30%, soutenu par l’éloignement progressif de la crise géopolitique avec l’Ukraine et le rebond des cours du pétrole début avril.

    L’Inde continue d’afficher des performances économiques solides. Le gouvernement poursuit ses annonces de réformes structurelles et de mesures budgétaires. Les marchés ont progressé de près de 10 % en Dollar depuis le début de l’année.

    En Chine, les publications décevantes et la contraction confirmée de l’activité industrielle ont freiné l’engouement des investisseurs. Pour relancer l’économie, le gouvernement prévoit d’engager des dépenses publiques supplémentaires. L’économie est toujours à la peine et enregistre un niveau d'inflation historiquement bas.
     
  • Au Japon : des signes encourageants

    Au Japon l’économie est sur une tendance de reprise modérée.

Nos conseils à court terme :

Tant sur les marchés obligataires que sur les marchés actions, la première partie de l'année nous aura prouvé que toutes les indicateurs macro économiques peuvent fluctuer et s'inverser très rapidement. Dans ce contexte, il est plus que jamais intéressant de privilégier les fonds dits flexibles qui peuvent s'adapter très rapidement aux soubresauts des marchés et se positionner sur toutes les classes d'actifs, toutes zones géographiques confondues.

  • Actions : Encore l'Europe

    les marchés européens sont en début de cycle de croissance et les prévisions sont revues à la hausse par l'ensemble des instituts. Aussi, il convient de privilégier un renforcement sur l'Europe. Les secteurs des Emergents et des Etats-Unis sont devenus plus spéculatifs. il conviendra de surveiller les 3 moteurs qui ont alimenté la forte hausse des derniers mois : baisse de l'euro, du pétrole et des taux. Le mouvement récent s'est inversé sur ces 3 paramètres mais ce n'est à l'évidence que temporaire.
     
  • Obligations : Instabilité en vue

    Comme nous l'avons vu, les taux devraient remonter dans quelques mois, mais pour le moment, les premières tentatives ne vont sans doute pas inciter les Banques Centrales à poursuivre sur la même lancée qu'au début du mois de mai. Malgré la perspective de hausse à moyen terme, les obligations servent toujours des taux très bas, il est par conséquent pertinent d'attendre encore un peu que les choses se stabilisent.
  • Fonds Euros :

    l'avenir des fonds Euros des contrats d'assurances-vie s'assombrit chaque jour un peu plus puisque les assureurs ont dû acheter des emprunts d'Etat de moins en moins rémunérateurs au cours des dernières années et différents rapports leur donnent une durée de vie restante de 3 à 5 ans. Il suffit d'extrapoler la courbe d'évolution des taux ci-dessous :



    Les assureurs inciteront nécessairement les épargnants à se repositionner sur des supports en unités de compte à relativement court terme. Voir le récent article des Echos sur ce sujet : https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/0212962886-pourquoi-lassurance-vie-doit-faire-evoluer-son-modele-1118984.php